Sur les bords de la Rivière aux Canards - Kamo Gawa - où est né le théâtre kabuki ...
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Sur les bords de la la Kamo Gawa - la Rivière aux Canards - à Kyoto se trouve la statue d'Izumo no Hokuni qui, il y a plus de 400 ans, interpréta un spectacle d'un genre nouveau qui évoluera pour devenir une forme de théâtre connue sous le nom de kabuki.
Izumo no Okuni est née, vers 1570, dans la province d'Izumo où elle officiait en qualité de prêtresse du grand sanctuaire d'Izumo. A cette époque, les sanctuaires avaient coutume d'envoyer leurs prêtres à travers le pays afin qu'ils présentent des spectacles à caractère religieux et recueillent des fonds en trouvant, le cas échéant, de généreux mécènes. Ainsi, Okuni avait été envoyée à Kyoto avec pour mission d'y interpréter des chants et des danses sacrées ; sa beauté et le caractère novateur de ses prestations firent d'elle une célébrité.
Okuni refusa de retourner au sanctuaire et entama une carrière artistique en se produisant, à partir de 1603, sur les berges de la Kamo Gawa. Les foules accouraient pour voir ses spectacles : un mélange de danse et de théâtre puisant dans les faits divers de l'époque. Okuni y tenait tous les rôles, ceux des hommes comme des femmes et présentait des spectacles qui n'avaient aucune chorégraphie et qui étaient appelés kabuki (ce qui veut dire excentrique).
Grâce à l'aide financière de son protecteur, un certain Sanzaburo Ujisato, Okuni introduisit une continuité à ses numéros de danse et de théâtre. Vingt-cinq ans durant, elle et sa troupe se produisirent sur les bords de la Kamo Gawa. Ses spectacles à succès attiraient aussi bien les gens du peuple que les puissant. Aussi, les propriétaires des maisons de plaisir organisèrent à leur tour des spectacles où les prostituées imitaient les danses d'Okuni. Les scandales provoqués par ses interprètes qui exerçaient la double activité d'artiste et de prostituée furent à l'origine d'un édit du shogun qui décréta l'interdiction pour une femme de se produire sur scène. Les danseuses furent alors remplacées par des adolescents efféminés qui causèrent à leur tour de nombreux scandales sur fonds d'homosexualité. En 1652, le shogun ordonna cette fois que les acteurs de kabuki devraient être des hommes d'âge mûr.
Le théâtre kabuki prit ainsi le caractère strictement masculin qu'il a aujourd'hui encore : tous les rôles y sont tenus par des acteurs professionnels, y compris les rôles féminins (onnagata) reconnaissables sur les illustrations de l'époque au petit mouchoir qui couvre le haut de leur crâne rasé.
Le jeu des acteurs prit de plus en plus d'importance dans le spectacle théâtral, si bien que le succès d'une pièce tenait essentiellement à leur capacité de captiver l'attention par leur talent et leur science des poses. Le public venait, non pas de la classe militaire des samouraïs qui préféraient l'aristocratique théâtre Nô, mais des rangs de la riche bourgeoisie qui aimait les histoires liées à la vie quotidienne, les costumes fastueux et les expressions exagérées.
La plupart du répertoire du kabuki, dont les oeuvres ont été écrites aux 17° et 18° siècles, est aujourd'hui d'une variété extraordinaire.
Au début du 17° siècle, Kyoto ne comptait pas moins de 7 théâtres de kabuki. Aujourd'hui, un seul subsiste, le Minami Za, qui fut le premier théâtre de kabuki a avoir été construit, en 1615.
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L'été, sur les bords de la Kamo Gawa, Isumo no Okuni ne danse plus.
Les restaurants de Pontocho ont installé leurs terrasses (yuka). Les dîneurs et les promeneurs qui profitent de la fraîcheur bienfaitrice de la Rivière aux Canards en ces chaudes soirées de juillet croient apercevoir, parfois, une frêle et gracieuse silhouette esquissant quelques pas de danse …
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